Organisation administrative et système juridictionnel : débats enrichissants des panelistes

La deuxième et dernière journée du Symposium sur le constitutionnalisme s’est déroulée ce mercredi 22 février 2023 à l’hôtel Rivera Royal de Kaloum. Les travaux du premier panel ont porté sur l’organisation administrative et système juridictionnel.

Sous la conduite de la modératrice Mme Gnarafing Diallo, le Conseiller juridique du Ministère de la santé et de l’hygiène Publique a exposé sur l’organisation administrative de la Guinée. Dr Mohamed Bérété a expliqué que dès l’indépendance, la République de Guinée a opté pour le principe de la déconcentration et de la décentralisation de l’administration. Ce qui renvoie du point de vue opérationnel au système de gestion des deux entités. La décentralisation est régie par des actes administratifs (décret, arrêté). Par contre, la décentralisation est régie par la Loi (Constitution et lois organiques). Le paneliste dira aussi que ces deux concepts (décentralisation et déconcentration) ont été mal utilisés.

Pour une meilleure efficacité dans la gouvernance locale, Dr Mohamed Bérété a proposé un transfert progressif des compétences aux collectivités décentralisées.

De son côté, le secrétaire général adjoint du CNT, a exposé sur l’autonomie des collectivités locales. Se fondant sur le principe constitutionnel de libre exercice du pouvoir au niveau local, Dr Kalil Aissata KEITA est parti des réalités du terrain pour expliquer le difficile exercice de ce pouvoir par les collectivités locales. Il s’agit notamment de l’inféodation des collectivités locales par le pouvoir central, l’absence de moyens financiers pour exercer, le manque de stratégies de mobilisation des ressources…Il a également insisté sur la neutralité, l’impartialité des exécutifs locaux, notamment en matière électorale.

Le Président de la Commission Constitution, Lois organiques et organisation judiciaire a ouvert le débat sur l’indépendance de la justice. En visioconférence depuis l’extérieur, l’honorable Mohamed Aly Thiam s’est d’abord interrogé sur l’indépendance de la justice vis à vis de qui ou de quoi ? En réponse, il dira que le principe de séparation des pouvoirs (Montesquieu) a réglé le problème. Mais, il estime que c’est dans la pratique, que l’indépendance de la justice est mise à rude épreuve. Les magistrats sont influencés par les pouvoirs publics. Cette hégémonie de l’exécutif est un préjudice à la justice. L’honorable Éric Thiam a rappelé que le magistrat est aux ordres de la Loi. C’est un impératif catégorique.

S’exprimant sur la même thématique, M. Yaya BOIRO a fait remarquer que le dysfonctionnement de la justice est à la base des différentes crises que la Guinée a connues. En outre, il a évoqué le problème d’accessibilité de la justice par les justiciables. Il dira par exemple que l’acte d’assignation qui coûte 125 000 GNF est souvent facturée à 500 000 GNF par certains acteurs de la justice. La Guinée ne dispose que de deux cours d’appel (Kankan Conakry). Il a recommandé le respect et l’application stricte du principe de séparation des pouvoirs, la soumission de l’État à la justice, le respect des libertés publiques…

Quelle possibilité pour renforcer l’indépendance de la justice ? C’est la thématique développée par l’honorable Maître Mohamed Traoré, membre de la commission Constitution, Lois organiques et organisation judiciaire du CNT. Il a commencé par préciser que la Loi règle le problème. Mais, évoque une mauvaise application de la Loi. Maître Mohamed TRAORÉ a invité les magistrats à ne pas se laisser influencer. « Une Constitution n’est pas une boîte à outils. Il faut que les magistrats prennent leur responsabilité », a-t-il déclaré.

Le paneliste recommande le fonctionnement optimal du conseil supérieur de la magistrature (CSM), retirer le Président de la République et le Ministre de la Justice du CSM, ouvrir le conseil supérieur de la magistrature aux autres entités pour éviter une organisation corporatiste où les magistrats se protègent entre eux, revoir le rôle du Ministre de la Justice par rapport à la politique pénale, …

Glodie KINSEM venu de la République Démocratique du Congo a été le dernier à développer la thématique sur l’indépendance de la justice. Il a mis un accent particulier sur les pays francophones. Il a fait savoir que la plupart des pays africains de langue française, ont le problème commun de l’indépendance de la justice. Pour rectifier le tir, il propose le principe « d’ingratitude » des magistrats vis-à-vis des pouvoirs publics. Bien qu’il soit nommé par le Président de la République ou des députés, le juge doit invoquer la Loi pour se soustraire des pressions de ces derniers. Il recommande plus de courage aux magistrats.  » Il nous faut des magistrats vertueux pour incarner l’indépendance de la justice  » a-t-il conclu.

Cellule de Communication

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